23 mars 2012

Elle et lui : histoire d’un carnaval

« Le carnaval de Dunkerque ? Oui je l’aime bien mais à la télévision », c’est l’avis de Marie*, une Dunkerquoise qui n’est pas d’accord avec ce qu’est devenue la plus célèbre festivité du nord de la France.

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« Il y a de plus en plus de monde qui vient et qui ne respecte pas ses règles ».
Pour elle, le carnaval est parfois un peu pénible, « pas forcement violent mais brutal ». Elle ne se rappelle plus des paroles des chants et ça fait longtemps qu’elle ne se déguise plus.
« Depuis tout petits, on était obligés à l’école de fabriquer des déguisements et des parapluies. Chaque année, on devait faire le carnaval, alors comme c’était un peu plus lié à l’école ça pouvait être bien vécu ou ça pouvait être aussi une sorte de devoir », raconte Marie.

En réalité, les bandes qui animent la fête continuent depuis des siècles à mobiliser la société dunkerquoise pendant deux mois complets. Le dernier bal, c’était le Bal du Printemps, qui clôt le carnaval mais pas l’esprit de camaraderie. En plus il donne la bienvenue à la nouvelle saison.
Marie, qui habite toujours dans le Nord-pas-Calais, préfère penser au côté traditionnel, elle nous a raconté l’origine du carnaval, l’histoire d’un marin et de sa femme, qui font la fête avant que celui-ci ne parte vers le Grand Nord.

« Il est dunkerquois, elle aussi. Lui, il est pêcheur, elle fait la cuisine. Il joue du tambour depuis tout petit, tandis qu’elle récite par cœur les chants qu’elle a appris. Elle est triste parce qu’il va s’en aller. Il est plutôt ivre et dit n’importe quoi. Il adore la mer malgré sa férocité. Elle n’a pas choix, elle doit l’attendre et se dit que « un jour il va revenir». Il va tout perdre même son argent. En Islande, la vie est trop chère: « Là-bas on n’utilise pas la monnaie, là-bas tu laisses le cœur ». La veille du départ, ils font la fête. Ils s’amusent bien parce qu’ils savent ce qui vient. Elle lui prête des vêtements. Il sourit. Elle n’est pas contente parce qu’elle sait qu’il va mourir.
C’est comme ça que la grande fête de Dunkerque doit finir, seulement quelques-uns de ceux qui sont partis vont revenir. Six mois c’est long, pense-t-elle, mais quand même il restera dans mon cœur pour l’éternité. »

À l’heure de la lancée de hareng, tout le monde lutte pour attraper un poisson. Marie s’assoit devant l’écran et corrige les examens. Elle habite à une heure de Dunkerque mais elle ne se dérange pas, on sait qu’elle n’aime pas le carnaval.
« Le vrai dunkerquois adore le carnaval, quelle que soit sa profession ou même s’il a déménagé, il revient exprès pour faire les chapelles et s’amuser avec ses amis », explique-t-elle. Puis, elle ajoute le cas de son cousin qui habite à Bordeaux. Lui, il prend des congés pour y aller tous les ans.


Adrián Roa Mendieta, étudiant mexicain en échange à Lille 3



* Les prénoms ont été changés.

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