08 avril 2010

Je ne voulais pas écrire sur la politique...

politique2.jpgOn m’a demandé d’écrire de politique, de reporter mes impressions de mon voyage en Italie.
J’ai dit non.
Pourquoi ? Pourquoi non ? Tu étudies sciences politiques, n’est-ce pas ?
« Drôle de fille : elle fait des études politiques mais elle déteste la politique », je pouvais lire dans leurs pensées.
Mais oui, c’est vrai.


Je suis italienne. J’étudie sciences politiques à Rome. Mais je déteste la politique : à savoir, je déteste ce qu’on appelle politique maintenant.
Pourquoi ? C’est assez simple, en réalité.
Je n’aime pas la politique, particulièrement celle de mon pays, parce que je suis une « rêveuse » , ou une « idéaliste », si ce mot vous rassure plus.

J’adore ma terre : l’Italie c’est pour moi le pays pour lequel lutter, pour lequel s’engager, dans lequel j’espère de passer ma vie. Mais je suis pour le changement, tandis que là-bas je ne vois qu’immobilité. Je suis convaincue que « ce sont les petits ruisseaux qui font les grandes rivières », mais je ne vois que du conformisme.

Causes perdues

Je crois que Don Quichotte gagnera, tôt ou tard, sa bataille contre les moulins à vent. Mon passe-temps favori est de m’engager pour des causes perdues.
Mais dans mon pays, malheureusement, c’est l’art de s’adapter, de ne rien dire, de « se débrouiller » afin que ses propres intérêts soient gardés, qui est à la mode. Ici « tout change pour que rien ne change », disait quelqu’un…
Comment lier tout ça avec les récentes élections régionales et l’abstentionnisme des Italiens (et pourquoi pas aussi avec les mêmes problèmes de nos « cousins » français)... Ce n’est pas mon affaire.

Est-ce que dans la politique il y a encore d’espace pour les rêves, pour les batailles, pour les changements ?
« S’éloigner de la politique c’est abandonner la bataille, se cacher, se déclarer vaincu. Il faut s’engager, se battre pour que le monde change », m’ont dit plusieurs personnes récemment. « Ok. Je vais le faire », j’avais répondu à la requête de faire un article « politique ».
« Mais il ne traitera pas de politique : ce sera plutôt de la philosophie ».
J’espère sincèrement qu’un jour prochain, les idéaux pourront eux aussi entrer dans le domaine de la politique...

Natalia Pazzaglia, étudiante Erasmus à Lille 3

17:36 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (1)

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ÉTIENNE DE LA BOÉTIE
De la servitude volontaire
ou contr'un
édition et présentation de Nadia Gontorbert
mémoire touchant l'édit de janvier 1562.
« Je ne voudrais rien sinon entendre comme il se peut faire que tant d'hommes, tant de bourgs, tant de villes, tant de nations endurent quelques fois un tyran seul, qui n'a puissance que celle qu'ils lui donnent ; qui n'a pouvoir de leur nuire, sinon tant qu'ils ont vouloir de l'endurer ; qui ne saurait leur faire aucun mal, sinon lorsqu'ils aiment mieux le souffrir que le contredire. Grand ‘chose, certes, et toutefois si commune [ ... ], voir un million d'hommes servir misérablement, ayant le col sous le joug, non pas contraints par une plus grande force, mais aucunement (ce semble) enchantés et charmés par le seul nom d'un, duquel ils ne doivent ni craindre la puissance puisqu'il est seul ni aimer les qualités puisqu'il est en leur endroit inhumain et sauvage. »
Le présent volume donne une édition critique du plus célèbre texte de La Boétie, suivi des remarques dont de Mesmes accompagna son exemplaire manuscrit du discours. Outre le La Boétie pourfendeur de la tyrannie, le Mémoire touchant l'édit de janvier 1562 révèle un commis du pouvoir chargé de missions souvent répressives qui l'entrainent au cœur même des guerres de religion. Ces deux textes s'opposent assez pour stimuler la réflexion sur l'opposition entre ce que Max Weber appelait la morale de la conviction et celle de la responsabilité.
………..Refuser l'autorité de plusieurs ou d'un seul, c'est apparemment rejeter la notion de République, si chère au peuple grec, en même temps qu'insulter gravement à la monarchie...
C'est ici que reparait la loi. Mais il ne s'agit plus de la loi d'Etat, La Boétie invoque le droit naturel. En effet, si l'autorité paternelle se justifie parce quelle émane de celui-ci, si
l'autorité d'un bon roi se défend, dans la mesure où elle assure aux sujets paix et bien-être, rien ne légitime l'autorité du tyran... si ce n'est l'homme même qui s’y soumet, faisant ainsi incompréhensiblement violence à sa nature.
Une seule réponse pour La Boétie. Si l'homme participe à son propre enchainement, c'est qu'il est dénaturé, au sens propre du terme. Animal parmi les animaux, l'homme devrait réagir comme ceux-ci : ruer comme le cheval, secouer le joug comme les bœufs se défendre comme l'éléphant. La nature enseigne partout la liberté et celle-ci est un devoir pour l'individu à l'intérieur même de la société que sa tendance particulière à la vie communautaire l'a incité à construire. Mais, avec les premières briques de l'édifice social, l'homme ne cimentait-il pas les fondations de sa prison? Ne brisait-il pas les élans de son imagination?
Quelle que soit la réponse, il est indéniable que la forme de la société constitue un moule pour les esprits : un homme du « peuple », né dans une société où l'esclavage a toujours été de règle, ne peut s'imaginer qu'un outre mode de vie soit possible pour lui-même et pour les autres. Il a donc toutes les raisons d'être un lâche, « un traître à lui-même ».
L'éternelle opposition de la nature à la coutume reparait ici : quand l'acquis l'emporte sur l’inné au point de le lui faire oublier, l'homme est voué à subir son sort au lieu de le forger. A preuve : les individus « mieux nays », eux, n'oublient jamais que la liberté existe, même si elle n'est pas de mise dans la société à laquelle ils appartiennent. Autre preuve : les tyrans se plaisent à maintenir leurs sujets dans l'ignorance...
C'est l'amorce d'une apologie de la culture, du savoir, de l’écrit, autant de recours au service de la nature et de la liberté et, en filigrane de l’éloge de Ronsard, Baïf et Du Bellay, peut-être peut-on lire également un hommage à la parole, seule capable d'éveiller les consciences.
Cette interprétation ne parait pas exagérée si l'un considère les moyens dont use le tyran pour se maintenir au pouvoir. Tout est bon pour divertir et pour tromper le peuple : théâtre, jeux, etc. Sous la férule du despote, la religion même, devenue religion d'État, glisse vers la représentation.
La crédulité des sujets fait d'eux une proie facile pour le conteur de miracles. Mais attention, prévient La Boétie, le tyran se fait à lui-même des contes... Son autorité est fragile, du fait même quelle est autorité. Les amis d'aujourd'hui, lassés d'obéir et avides de pouvoir, guettent la moindre faiblesse... et la religion n'offre guère au despote le refuge quelle réserve aux justes...

Écrit par : alice | 18 avril 2010

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